Qu’est-ce que le biomimétisme et comment est-il lié aux enjeux de décarbonation ?

Le dérèglement climatique entraîne des changements rapides et de plus en plus importants, transformant l’environnement dans lequel nous vivons.

En 2023, 6 des 9 limites planétaires ont été franchies (seuils au delà desquels les activités humaines pourraient compromettre les conditions favorables à la vie telle que nous la connaissons), et chaque année, le jour du dépassement de la Terre – date à partir de laquelle nous avons consommé toutes les ressources que notre planète peut régénérer en une année – est atteint plus tôt que l’année précédente.

En l’espace de cinquante ans, le jour du dépassement à avancer d’environ 5 mois.

La planète se trouve aujourd’hui bien au-delà de l’espace de fonctionnement sûr pour l’humanité et un grand nombre d’autres espèces animales et végétales.

Il est urgent d’apporter des solutions techniques et organisationnelles à nos modes de vie pour les rendre plus résilients et en accord avec la planète qui nous héberge.

Dans le même temps, on constate l’impressionnante capacité d’adaptation de la nature, même aux conditions environnementales les plus extrêmes. Alors pourquoi ne pas s’inspirer des méthodes du vivant pour être plus en harmonie avec notre environnement ?

Qu’est-ce que le biomimétisme ?

Le biomimétisme, qui signifie littéralement “imiter la vie”, est une approche multidisciplinaire consistant à s’inspirer des formes, des processus et des interactions de la nature pour mettre au point des procédés ou des organisations permettant un développement durable de nos sociétés.

Concrètement, le biomimétisme correspond à 3,8 milliards d’années de R&D et d’innovations naturelles dont l’être humain peut s’inspirer pour répondre intelligemment aux défis qui lui font face.

Trois niveaux d’inspirations principaux sont identifiés :

  1. Les formes adoptées par les êtres vivants ;
  2. Les matériaux et processus de fabrication opérant chez les êtres vivants ;
  3. Les interactions que les espèces développent entre elles et le fonctionnement global des écosystèmes naturels.

Ces niveaux nous permettent de rechercher des solutions performantes déjà sélectionnées et éprouvées par les organismes vivants. Ces solutions visent notamment à réduire les coûts énergétiques, à minimiser les émissions et à assurer la non-toxicité des produits.

Défini en 1997 par Janine Benyus, le biomimétisme propose une démarche en trois étapes :

  • Analyser les systèmes biologiques ;
  • Abstraire ces systèmes en modèles ;
  • Appliquer ces modèles à des développements techniques ou organisationnels répondant à des besoins spécifiques.

Le biomimétisme correspond à un type de conception bio inspirée, mais toutes les conceptions bio inspirées ne sont pas du biomimétisme ! On retrouve ainsi le bio morphisme, dont le design ressemble à la nature, le biomimétisme, dont le design fonctionne de la même façon que la nature, et la bio utilisation, dont le design utilise des éléments naturels.

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Quels domaines d’application ?

On retrouve le biomimétisme dans de nombreux champs d’applications. Cette approche s’applique à toutes les activités humaines, aussi bien la santé que la construction, l’agriculture ou encore la robotique et le numérique. Du point de vue de la décarbonation de nos modes de vie, on retrouve notamment le biomimétisme dans les secteurs suivant :

Energie : s’inspirer du vivant pour pouvoir recourir à des énergies propres comme le solaire, développer des méthodes de stockages de ces énergies et de capture du CO2 (en s’inspirant de la photosynthèse par exemple) ;

Chimie : le développement de la chimie verte, avec l’utilisation de réactions mettant en œuvre des composés naturellement abondants, le principe de biodégradation qui rejoint les processus chimiques ;

Matériaux : les matériaux du vivant présentent eux aussi une diversité et des caractéristiques remarquables (légèreté, auto réparation, propriétés multifonctionnelles, solidité…)

Gestion de l’information : les systèmes biologiques favorisent une approche minimaliste et optimisent les informations qu’ils reçoivent afin de limiter la consommation des ressources et les coûts énergétiques, ce qui les rend également plus adaptables et résilients ;

Le biomimétisme s’applique à bien d’autres champs d’applications tels que l’urbanisme ou nos systèmes organisationnels qui peuvent s’inspirer du fonctionnement des écosystèmes pour devenir plus durables.

Quelques exemples

Des technologies de notre quotidien inspirées de la nature

Le velcro (ou scratch) est un des exemples les plus connus de la biomimétique. Inventé par l’ingénieur suisse George de Mestral en 1941, il s’inspire du système de dissémination des graines de la bardane qui s’accrochent au pelage des mammifères. En effet, ces graines sont recouvertes d’une multitude de petits crochets qui s’accroche particulièrement bien aux poils des animaux. L’ingénieur suisse a observé ce phénomène en revenant d’une promenade avec son chien, couvert de ces graines. Il a par la suite reproduit ce phénomène avec une bande de velours reproduisant le poil des animaux et une bande de crochets jouant le rôle des fruits de la bardane.

De nouvelles technologies biomimétiques inspirantes

Face aux enjeux du réchauffement climatique, le biomimétisme propose aussi des solutions efficaces pour se protéger de la hausse des températures, comme le montre l’Eastgate Building, un centre commercial situé à Harare au Zimbabwe et dont le système de climatisation s’inspire du fonctionnement des termitières, dont l’étude a démontré un système de ventilation très ingénieux.

“Du fait de sa densité, l’air chaud est attiré vers le haut de la termitière et est ensuite évacué par cette cheminée. Ce phénomène entraîne un courant d’air dans les parties basses du nid. L’air est aspiré dans les parties inférieures grâce à des petits trous situés tout autour du nid. Il circule ensuite sous terre où il est rafraîchi au contact de puits très profonds (de 15 à 20 m en général) que les ouvriers creusent pour atteindre la nappe phréatique. Cet air frais remonte ensuite vers la surface rafraîchissant ainsi la termitière.”

Le “lightweight design” est un autre exemple de biomimétisme. Cela consiste en la conception de produits ou structures les plus légères possibles tout en maintenant une résistance mécanique importante. Les structures alvéolées comme les ruches d’abeilles, les os (notamment des oiseaux) ou encore les éponges de verre, soumises à de forts courants sous-marins et une grande pression, sont d’excellentes sources d’inspiration pour cette méthode. Ces structures sont en effet composées de plus d’air que de matière ce qui leur confère une grande légèreté et des économies de matières, tout en maintenant d’impressionnantes capacités mécaniques.

Le lightweight design est très intéressant pour l’industrie et l’architecture notamment car, en plus de nécessiter moins de matières premières, un matériau léger sera responsable de moins d’émissions de CO2 lors de son transport, la consommation de carburant étant directement reliée au poids transporté. Cela permet d’obtenir des structures et matériaux écologiques et économiques.

Une norme pour accompagner les entreprises dans une démarche biomimétique

Depuis 2015, un cadre normatif autour du biomimétisme a été établi avec 3 normes ISO (ISO 18457, ISO 18458 et ISO 18459) et une norme expérimentale AFNOR (XP42-502). On trouve notamment la norme “ISO/TC 266 18458 : 2019 – Biomimétisme – Guide de démarrage rapide pour les entreprises”. Cette norme fournit des lignes directives pour aider les entreprises à comprendre et à appliquer les principes du biomimétisme dans leurs activités et leurs produits.

Elle propose des informations sur les bases du biomimétisme, les avantages de son application dans le contexte des entreprises, les étapes pour intégrer le biomimétisme dans les processus de conception et de développement de produits, ainsi que des exemples pratiques de succès dans différents secteurs industriels.

En résumé, cette norme vise à encourager l’adoption du biomimétisme par les entreprises en fournissant un guide pratique pour commencer à intégrer les principes biomimétiques dans leurs activités et à bénéficier des avantages de cette approche innovante et durable.

Pour conclure

Intégrer le biomimétisme à des matériaux, des procédés – notamment industriels – et même d’un point de vue organisationnel à plus ou moins grande échelle représente un immense potentiel pour rendre nos systèmes plus durables et résilients. La nature regorge de solutions d’une efficacité redoutable pour répondre à nos défis actuels et futurs, il ne tient qu’à nous de s’en inspirer pour l’intégrer dans des démarches d’éco-conception, de low-tech et/ou d’efficience énergétique afin de permettre un développement plus en accord avec notre environnement.

Si ce sujet vous intéresse, les 11 et 12 juin 2024 se tiendra la Biomim’expo : “sur la piste du vivant” au Parc floral de Paris, regroupant des ateliers conférences, témoignages… sur les sujets biomimétiques !

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